lundi 9 janvier 2012

Au fléau de son aile ...


" L'oiseau, de tous nos consanguins le plus ardent à vivre, mène aux confins du jour, un singulier destin.
Migrateur, et hanté d'inflation solaire, il voyage de nuit, les jours étant trop courts pour son activité. Par temps de lune grise couleur du gui des Gaules, il peuple de son spectre la prophétie des nuits .
Et son cri dans la nuit est cri de l'aube elle-même : cri de guerre sainte à l'arme blanche .

Au fléau de son aile, l'immense libration d'une double saison ; et sous la courbe du vol, la courbure même de la terre ...
L'alternance est sa loi, l'ambiguïté son règne.
Dans l'espace et le temps qu'il couvre d'un même vol, son hérésie est celle d'une même estivation.
C'est le scandale aussi du peintre et du poète, assembleurs de saisons aux plus hauts lieux d'intersection.

Ascétisme du vol !
L'oiseau, de tous nos contemporains le plus avide d'être, est celui-là qui, pour nourrir sa passion , porte secrète en lui la plus haute fièvre du sang. Sa grâce est dans la combustion. Rien là de symbolique : simple fait biologique. Et si légère pour nous est la matière oiseau, qu'elle semble, à contre-feu du jour, portée jusqu'à l'incandescence .

Un homme en mer , flairant midi lève la tête à cet esclandre : une mouette blanche ouverte sur le ciel, comme une main de femme contre la flamme d'une lampe, élève dans le jour la rose transparence d'une blancheur d'hostie ...

Aile falquée du songe, vous nous retrouverez ce soir sur d'autres rives ."

Oiseaux, Saint-John Perse

4 commentaires:

  1. sur ta photo j'y vois une enfant de dos assise dans l'eau, une fleur dans ses cheveux, et sa robe légère et trempée.

    c'est beau

    je t'embrasse et te garde en mon coeur ma Kaïkan

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  2. quel beau texte!!!
    besos
    tilk

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  3. Ne sois pas si rare, tu manques ...

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