Elle est née la troisième série de trois illustrations en vue de l'expo ...
Elle est née au froid de l'hiver, à un week-end sans feu , en lien direct avec les conditions de l'époque ...
Suspens
Peu s’en faudrait que je doute que les morts
ne soient plus,
qu’ils ne transmettent plus rien, aient perdu
toute parole
malgré tant de présence vivante autour de nous,
qui se serait à eux substituée dans ce silence
selon un credo commun, affiché, définitif.
On ne se sent pas entier amarré aux certitudes
qui de toute façon disent plus qu’elles ne
devraient,
quand un rai de soleil moins persuasif que les
autres
échoue à submerger l’ombre d’une main en suspens
devant un éventail de questionnement sous sa
feuille.
Pris d’inquiétude, on n’ignore pas toujours
l’appel
même assourdi, de ce qui palpite par
l’entourage
comme une jeune chênaie dans la brise du
matin,
fût-ce en l’absence d’un filet d’air
traversant la pièce.
Peu s’en faudrait que je croie les morts
libres parmi nous
d’être regard, pensée, affleurant sous notre
langage,
à nous tendre quelque trop propice pont des
soupirs.
On s’y hasarde par seule fatigue ou par
faiblesse,
voulant donner toujours mais inaptes à
recevoir.
Vint ensuite le
Récit d'un rêve
Jusque dans la fiction : Récit
d’un rêve (extrait de roman)
A force de penser à son père trop tôt parti, René
s’endormait. Il se retrouva assis à califourchon sur une chaise devant un feu
de bûches de chêne. C’était dans un salon rustique de taille moyenne, inconnu
de lui. Température : au moins vingt degrés, contrastant avec le froid
hivernal du dehors. Les flammes du foyer éclairaient faiblement une moitié de
la pièce. Leurs rougeoiements follets animaient les formes alentour. Juste
devant lui, comme dans un bus, le dos d’un homme assis tassé sur sa droite.
Accoudé sur sa cuisse comme s’il ployait sous son propre poids. Respiration
sifflante, pénible, lente aussi. Le cœur de René cognait à tout rompre, à lui
faire mal. A lui transpercer la poitrine. Un léger pivotement de la forme
humaine venait de lui montrer qu’elle n’avait pas de bras gauche. La manche
vide, pliée, semblait agrafée à l’épaule. Longues minutes d’absolu néant dans
sa tête, de trop-plein dans sa gorge serrée. D’effroyable match nul bonheur -
douleur. Si cruellement improbable, l’amputé était pourtant là. Mais où,
d’ailleurs ? Il parla même, de sa voix chaude, sans se retourner :
« Pourquoi tu restes loin,
Coco ? ».
René était étranglé par l’effort de plus en plus vain de rentrer
les larmes.
« Tu n’es pas content de me voir ? »
Sans
comprendre comment, roulé par un Liamone en crue de sanglots, il se trouva
maintenant assis à la droite de l’homme. Côte à côte, toujours à la façon de
gens dans un autobus. Ses yeux brouillés se tournèrent vers le
passager. C’était bien lui. En chair et en os. Comme vous et moi. Il avait
voyagé et souffrait sans doute. Il respirait avec peine mais restait souriant.
Il gardait le silence là-dessus, dans la bonté dont René avait toujours eu le
cœur nourri.
« Tu me dis rien ?
- Si. »
René
désirait tellement lui en dire plus que ça. Il se retenait encore de le croire
tout à fait possible. Incertain de lui-même autant que de la réalité de la présence. Il craignait d’être
victime d’une hallucination. Aucune raison pourtant d’éprouver un doute plus
tenace : il s’imprégnait physiquement de cette odeur double. Il l’eût
reconnue entre mille. Il ne l’avait plus respirée depuis cinq années. A
l’instant, il y roulait. Il y noyait son âme. La légère âcreté d’une vie
entière de courage et de travail au service du bien commun, mêlée à la
fraîcheur d’une eau de Cologne toute simple, à l’extrait de lavande. Alors il
l’achetait au litre, en pharmacie. A l’écart de toute préciosité ou esprit de
mode. René en reconnaissait la marque, sans risque d’erreur. Rien à voir avec
ces après-rasage chichiteux, eaux de toilette pour heummes vendues en
flaconnets ressemblant comme deux gouttes de parfum aux fioles pour femmes. Ce
produit avait dû rester le même depuis la seconde guerre mondiale à laquelle il
avait payé le tribut de son bras.
Le
feu lui faisait du bien. René en recouvra une part de quiétude. L’homme
soupira un « ah » profond
de soulagement. Son bras droit, encore lourd, s’enroula autour de l’épaule du
fils comme d’abandon ou de lassitude. La main unique qui avait tant travaillé
et donné pendait maintenant contre sa poitrine. René la lui prit des deux
siennes. Il ne put s’empêcher de la plaquer contre sa joue pour en capter la
bonne chaleur sur sa peau. Il la baisa avec un respect indicible, en
prenant garde de ne pas serrer trop fort. C’était bon. Cette main unique avait
su le porter. Elle l’avait contenu, parfois. Il palpa
l’annulaire, sentit la chevalière en argent de toujours, sauf qu’elle tournait
autour du doigt qui avait maigri. René s’interrogeait sur le lieu où ils se
trouvaient, devant ce feu. Aucun signe ne lui permettait de le déduire. Il
comptait sur les mots qu’il allait entendre. Cette question, d’ailleurs,
devenait incidente. Seule avait de l’importance SA présence, où qu’il fût…
Et enfin
Vide
Accommodant
mal dans leur solitude
ils sentent en filigrane la
chaleur de l’Aimé
lointaine sous silence sous
regard sous présence
dont ils durent le départ à contrecœur
accepter
eux vent sans direction piégé
dans la moindre encoignure
que tout objet détourne mais
qui traverse les murailles
sans franchir le seuil des
tanières et terriers
qui violente l’espace entre
les pages du livre clos
que sépare une photo à relief
de montagne
Et puis, il y a toutes les étapes du travail, la musique qui les accompagne, mes questionnements et doutes qui se trouvent posés sur
https://facebook.com/michele.lenoir1
Juste d'autres pages du journal à découvrir
...
Textes et peintures émouvants. Où l'expo a-t-elle lieu ?
RépondreSupprimerOups, j'ai du chercher ;-))
RépondreSupprimerL'expo aura lieu en l'Hôtel de Ville de Horbourg-Wihr (proche banlieue de Colmar) en mai et juin prochains ;-))
Voici, voilà, vous y êtes la bienvenue ;-))
Sous l'aile du silence
RépondreSupprimerla beauté chuchote
cette présence infinie
amitié vers toi
ma chère Kaïkan
je suis une fois encore admiratif
RépondreSupprimerbesos
tilk
Merci Kaikan pour les messages sur mon blog. Dommage que Colmar soit si loin !
RépondreSupprimerTrès émue par tout ce que j'ai découvert ici... en mots, en œuvres picturales, en sensations... Marithé
RépondreSupprimerCette superbe illustration (j'ai aussi les yeux tout émerveillés des autres) me donne le vertige comme si il y avait une porte sur un inconnu sans limites. Je t'embrasse.
RépondreSupprimerJe suis revenue passer du temps sur le Kaïkan. Il est reparti pour une superbe navigation et cela me donne de l'énergie. Je t'embrasse.
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